Antoine- Augustin Cournot remarquait dans ses Fondements de nos connaissances (1851) que les mots s’usent, que les traces de leur étymologie se perdent et qu’ils se dénaturent.
C’est vrai de tous les mots mais plus encore de ceux qui représentent un enjeu (de politique ou de société, voyez le mot « mariage ») dont le sens est alors volontairement détourné et dénaturé. Le mot « Français » est de ceux-là.
Qu’est-ce qu’un Français ? Tenter de donner directement une définition relève de l’exploit tant le mot « Français » est vidé de sa « substantifique moelle » et ne veut plus rien dire. Les mots dénaturés sont des planches pourries sur lesquelles il vaut mieux ne pas s’appuyer. Si vraiment on y est obligé, il vaut mieux préalablement les étayer en faisant quelques rapides détours.
Il faut d’abord faire remarquer qu’on est « Français » par l’appartenance à un peuple (le « peuple français). Il convient donc de définir ce qu’est un peuple afin de définir ce qu’est le « peuple français » et finalement un « Français ».
Pour cela il sera utile de se référer aux conceptions juives car le peuple juif est sans doute le peuple qui a le plus intensément réfléchi à sa condition en tant que peuple (le « peuple élu ») et qui très tôt donnera une représentation universellement valable et juste de ce qu’est un « peuple ».
Dès l’Ancien Testament, le peuple juif établit qu’un peuple est une lignée (celle des fils d’Israël), une religion (le judaïsme) et une culture (la judéité). Ces trois déterminants essentiels sont indissociables. Un Juif (de nation) est un fils d’Israël (par la lignée) et un juif (par la culture et la religion) et inversement, un juif (de culture et de religion) est un « fils d’Israël (par la lignée) et un Juif de nation (d’où son droit à rejoindre l’Etat juif). Le peuple juif, peuple modèle qu’il nous faut écouter dès lors qu’il est question de « peuple », nous enseigne ainsi qu’un peuple se définit avant tout par sa lignée, sa religion, sa culture.
Cette conception est juste et universellement vérifiable. Le peuple français peut (au nom de l’égalité entre les peuples) et doit (puisque cela est conforme à la réalité) se définir sur le modèle du peuple juif. Ainsi, le peuple français est une lignée, une religion, une culture : une lignée européenne, une religion pagano-chrétienne (au sens sociétal), une culture française (élément d’une civilisation européenne).
De même qu’un Juif peut se définir par sa lignée hébraïque, sa religion juive et sa culture juive, un Français est fondé à se définir lui-aussi par sa lignée, sa religion, sa culture.
Donc, qu’est-ce qu’un « Français » ?
Un « Français » est une personne de lignée européenne, de religion chrétienne et de culture française. Il va de soi qu’en République cette définition ne s’accorde qu’aux Autochtones de France, aux Français de souche, si l’on préfère.
Les aléas historiques ont forcé les Juifs à penser l’appartenance bien plus tôt que nous. Il ne faut pas écarter leurs conclusions : leur justesse se vérifie depuis 3000 ans. Quand il est question de peuple et d’appartenance nous pouvons marcher sans crainte sur leurs pas (comme le font par exemple les Kanaks de Nouvelle-Calédonie, voyez le texte des Accords de Nouméa).
Tous les hommes ont le droit de se définir par leur lignée, leur religion, leur culture. Les Français ne font pas exception à la règle. Un Français n’est pas une sorte de surhomme, quintessence de l’Homme ayant accédé à l’universel (quelle outrecuidance que de le penser !), ni une sorte de sous-homme privé de l’identité qui fait les hommes. Un Français est un homme qui a le droit comme un Juif, un Kanak, un Mohawk ou n’importe qui d’autre de revendiquer une lignée ancestrale, une religion sociétale et une culture sociétale. Lui refuser ce droit élémentaire, c’est refuser son droit à l’humanité. N’est-ce pas ce qui caractérise le racisme ?
Antonin Campana