Face aux propos « insupportables » de Nadine Morano sur la « race blanche », Manuel Valls a éructé bave aux lèvres que « Marianne n’a pas de race, pas de couleur ». Et il a raison !
Il a raison parce que Marianne incarne la République* (1). Il a raison parce que la République est un régime politique dont les principes sont universels. Il a raison parce que sous prétexte de cette universalité, la République prétend pouvoir faire « vivre ensemble » des hommes de toutes les races, de toutes les couleurs, de toutes les religions, de toutes les origines, et qu’elle ne s’en prive pas grâce à des politiques d’immigration aujourd’hui, comme de colonisation hier (immigration et colonisation étant les deux faces d’une même réalité idéologique).
Mais Morano ne parlait pas du régime politique temporairement en place (« Marianne ») mais d’un espace civilisationnel millénaire (un « pays » dit-elle) et d’une nation* séculaire (la « France* » ajoute-t-elle). Valls est en plein délire républicain lorsqu’il confond nos ancêtres qui ont peint la grotte Chauvet, qui fondèrent une nation gauloise, qui bâtirent des Cathédrales, qui marchèrent derrière Jeanne d’Arc ou qui furent décimés par les violences républicaines, avec cette pauvre « Marianne », prostituée soumise à l’oligarchie, ne respectant que ceux qui la forcent, voyez la décolonisation, voyez la Nouvelle-Calédonie. Là-bas, la gueuse a courbé la nuque et écarté les jambes, reconnaissant le peuple kanak comme « population d’origine », reconnaissant son nom, son identité, sa civilisation, ses traditions, reconnaissant la nécessité de restituer à ce peuple son « identité confisquée », ses symboles, sa culture… (Loi organique 99-209 et Accords de Nouméa).
« Kanak » : un nom reconnu par la République qui renvoie donc à la « population d’origine » de la Nouvelle-Calédonie. Mais comment Nadine Morano pouvait-elle nommer la « population d’origine » de la France ? Par quel nom ? « Français » ? Mais ce mot ne veut plus rien dire ! C’est un nom volé aux Autochtones de ce pays, que la République universelle a donné aux multitudes extra européennes venues s’installer au milieu de notre peuple (et même souvent à des populations étrangères résidant encore dans leur propre pays !). Pour juger de l’indécence, imaginons qu’elle ait indistinctement nommé « Kanaks » les natifs de l’archipel et par exemple les métropolitains venus s’y installer !
Dès lors, ne trouvant pas de nom à notre peuple, est-il étonnant que Nadine Morano utilise les mots que l’on entend couramment, dans des contextes toujours stigmatisant d’ailleurs, lorsqu’un policier « blanc » tue un jeune « noir » par exemple, ou quand il s’agit d’enseigner que les « blancs » ont colonisé l’Afrique ou exterminé les Indiens d’Amérique ? Le mot « blanc », qui renvoie bien à un groupe ethnique ancestral, une race et une couleur donc, ne peut-il être employé qu’à condition de porter atteinte à cette « race » sans jamais la considérer avec justice ? N’est-ce pas alors du racisme ? Et comment Nadine Morano pouvait-elle donc nommer la « population d’origine » de ce pays sans faire état de cette « blanchitude », insuffisante certes pour la caractériser mais que seul le déni de réalité peut faire contester ?
En vérité, si Morano parle de « race blanche » c’est précisément parce qu’elle y est contrainte en raison de ce crime odieux commis contre le peuple autochtone* de ce pays. Car c’est un crime de priver un peuple de son nom, de l’en déposséder pour en faire une catégorie administrative ouverte à tous les vents, l’empêchant par cela de se nommer, et pire : de se penser ! Un peuple qui n’est plus nommé est un peuple qui cesse d’exister, que l’on peut nier comme le fait la République : c’est une extermination symbolique, un crime contre l’humanité.
En tant que républicain, Manuel Valls devrait avoir la décence de demander pardon. Nous lui suggérons cette formule, qu’il pourra peut-être un jour - l’Histoire n’étant pas avare de retournements spectaculaires - réciter devant un TPA (Tribunal Pénal Autochtone) :
« Au nom de ce régime totalitaire qui s’est artificiellement identifié à la France, qui a sans scrupule dépossédé les Autochtones de leur nom, le confisquant pour son usage, le vidant injustement de son riche contenu identitaire, le privant de son antique dimension européenne afin de le réduire à un statut juridico-administratif distribuable à tous les hommes de la terre quelles que soient leur origine, leur race et leur religion, moi Manuel Valls, misérable ministre de ce régime politique criminel, je demande pardon ».
Et tant qu’il y est, qu’il demande aussi pardon à Nadine Morano, dont le seule crime est d’avoir révélé malgré elle l’existence d’un vieux peuple blanc qui construisit une civilisation prestigieuse et que la République sans couleur entend définitivement « effacer ».
Antonin Campana
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