Emmanuel Macron ne cache pas qu’il a longuement étudié Nicolas Machiavel. Le futur président du régime a même déclaré au New York Times que le penseur italien lui aurait permis de survivre à la « politique parisienne » ! Quelle chance pour les Français !
Cet intérêt jupitérien pour Machiavel nous est revenu en mémoire après la volte-face présidentielle sur les « violences policières ». On ne pouvait en effet, comme on nous le suggère, mettre ce revirement sur le compte d’une nouvelle image, d’une nouvelle vidéo ou d’un nouveau témoignage : ils s’accumulent depuis un an au rythme effroyable des éborgnés et des mutilés ! Les choses sont en fait bien plus simples et bien plus calculées : Macron et le gouvernement sont convaincus que l’épisode des Gilets Jaunes est derrière nous ! Quel rapport, direz-vous, avec la remise en cause des forces de l’ordre ? Le rapport est double, et pour le comprendre il faut relire Le Prince de Machiavel.
Machiavel expose, dans le chapitre XIX, que le Prince doit « éviter avec soin toutes les choses qui le rendraient odieux et méprisable ». Aussi :
« le prince doit se décharger sur d’autres des parties de l’administration qui peuvent être odieuses, et se réserver exclusivement celles des grâces ».
La répression, notamment, doit être exercée par une « tierce autorité » qu’il sera éventuellement possible de blâmer ou de sanctionner lorsque l’ordre sera rétabli. Ainsi, cette « tierce autorité » accumulera la haine pendant que le Prince s’attirera les sympathies du peuple.
On ne peut que conseiller aux membres des forces de l’ordre de lire et de relire Le Prince. Elles ont été les « tierces autorités » chargées de ramener l’ordre macronien. Maintenant que l’ordre est rétabli (dans l’esprit des dirigeants), la communication présidentielle va se charger de leur faire endosser toute la violence déployée, bien que tacitement autorisée par le pouvoir politique. En accablant cyniquement ceux qui n’ont été pourtant qu’un instrument de violence entre ses mains, Emmanuel Macron pense se dissocier de cette violence et s’attirer ainsi les sympathies du peuple. C’est prendre celui-ci pour un imbécile. Personne n’est dupe du procédé.
Il y a une expression populaire un peu vulgaire, mais que je vais me permettre d’employer ici car elle traduit bien la réalité et a de plus une signification quasi éthologique qui n’échappera à personne : Policiers et CRS, le pouvoir républicain « vous pisse dessus » ! Il vous pisse dessus car vous n’êtes pour lui qu’une « tierce autorité » chargée de polariser la haine. Pas davantage. Et vous avez servilement fait votre boulot de tierce autorité ! Vous avez tout perdu : le pouvoir vous méprise et maintenant le peuple se méfie de vous. Pourtant, vous aviez l’estime de ce peuple, pas celui des banlieues bien sûr, pas celui qui vous insulte, pas celui devant qui votre hiérarchie vous demande de baisser la tête, pas celui qui compose votre « clientèle » habituelle, pas la tierce autorité black bloc : le petit peuple de France qui était sur les ronds points et que vous avez, un peu quand même, martyrisé.
Dans l’Histoire, il y a une loi qui s’applique à tous les individus : il ne faut jamais trahir son peuple ! Tôt ou tard, on le paie. Vous le payez aujourd’hui par le mépris et la défiance qui vous rongent l’âme. C’est justice. Il ne tient qu’à vous d’ignorer le pouvoir oligarchique et de revenir à votre peuple. Votre place est au milieu de lui. Il vous attend fraternellement !
Antonin Campana