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Terre Autochtone

Terre Autochtone

Le blog des aborigènes d'Europe, par Antonin Campana


L’exemple amish

Publié par Antonin Campana sur 29 Décembre 2017, 09:20am

Catégories : #Perspectives Autochtones

L’exemple amish

Parmi les communautés ayant été persécutées dans l’histoire, il en est une dont on ne parle presque jamais : la communauté amish.

La communauté amish a été fondée en Alsace, en 1693, par Jakob Amman. Amman était originaire du canton de Berne en Suisse et s’était installé en Alsace, comme de nombreux Bernois anabaptistes ayant fui les persécutions religieuses orchestrées par les autorités du canton (les anabaptistes devaient se convertir à la religion calviniste, ou quitter le pays). 

L’Eglise amish va naître d’un schisme à l’intérieur de la communauté anabaptiste alsacienne. La vie du mouvement en Alsace va cependant être de courte durée puisque Louis XIV, par un décret de 1712, va prononcer son expulsion du royaume. Les Amish, forcés de se disperser vers la Lorraine puis vers les Pays-Bas, sont ensuite partis vers l’Amérique du Nord.

Il y a de nos jours, principalement  aux Etats-Unis (Pennsylvanie, Ohio, Indiana…), environ 318 000 Amish. Les persécutions du XVIIe et XVIIIe siècles sont certes de lointains souvenirs, mais la communauté amish est confrontée aujourd’hui à un environnement qui lui est au final tout aussi hostile.

 On imagine bien en effet qu’une société qui entend vivre comme on vivait au XVIIe siècle doit subir et résister aux assauts d’une modernité qui, notamment pour les plus jeunes, ne manque pas d’attraits. Le mode de vie des Amish est extrêmement austère et rude, fait de nombreuses privations, alors que la société de consommation et de loisirs qui les entoure paraît insouciante, ludique et facile. Il suffit de déserter la communauté pour profiter d’une liberté sexuelle sans limite, d’objets de toutes sortes, d’amusements  permis et d’un emploi salarié plus rémunérateur et plus valorisant que celui de laboureur à la mode d’autrefois, avec cheval de trait et charrue de  type Brabant.  Quel est le jeune Amish qui ne rêverait pas d’avoir comme les gens qu’il côtoie une voiture à moteur, une télévision, un ordinateur, un téléphone portable, une petite amie ? Résister à des persécutions physiques est une chose difficile. Résister à l’attirance du vide peut l’être tout autant, le Système l’a bien compris.  

Les Amish sont conscients du pouvoir d’attraction qu’exerce la société extérieure. Ils savent que ce pouvoir peut entraîner la désagrégation de leur communauté. Comment y résistent-ils ?

Par la sélection tout d’abord. Il existe chez les Amish une sorte de rite de passage appelé la « Rumspringa ». Durant la Rumspringa, les adolescents amish âgés de plus de 16 ans sont libérés de leur Eglise et de ses règles. Ils sont incités à découvrir la société qui les entoure. Ils peuvent s’habiller de vêtements modernes, boire de l’alcool, fumer, se droguer, flirter et nouer des relations avec des jeunes qui ne sont pas de leur communauté. Les filles peuvent se maquiller, porter des bijoux et des jupes courtes… La Rumspringa se termine par le retour du jeune dans sa communauté ou son départ définitif. A la fin de la période, environ 90% des jeunes Amish demandent leur baptême. Ils sont définitivement intégrés dans la communauté et sont désormais obligés d’en suivre les règles. 10% des jeunes font le choix de vivre dans la société moderne : ils sont alors exclus de la communauté.

Par une discipline de fer ensuite. Les communautés amish sont sous l’autorité d’un Conseil presbytéral ou Conseil des Anciens composé notamment d’un évêque, d’un prêcheur et de deux diacres. Le Conseil dispose de deux armes redoutables : l’excommunication et l’exclusion sociale. 

L’exclusion sociale peut être prononcée à l’égard de celui qui a enfreint certaines règles de la communauté (utilisation de technologies interdites, port de vêtements prohibés…). En pratique, un Amish peut toujours parler ou offrir de l’aide à un membre banni, mais il ne doit pas manger avec lui, faire des affaires avec lui, recevoir quelque chose de lui, monter dans sa voiture, etc. L’objectif est de faire revenir le contrevenant dans le droit chemin.

L’excommunication, quant à elle, est prononcée en dernier recours quand un membre a commis un péché grave ou lorsqu’il persévère dans sa transgression des règles. L’excommunication peut être temporaire ou définitive et se traduit par une exclusion totale de la communauté. Un excommunié sera évité par ses parents, ses amis et tous les membres de la communauté. Un Amish excommunié se retrouvera donc seul, sans le soutien d’un réseau social qui fonctionne depuis des siècles. 

Par la pratique d’une forte endogamie et d’un faible prosélytisme. Les Amish pratiquent une stricte endogamie (qui leur permettrait de vivre dix ans de plus que la moyenne). 86% des mariages sont conclus entre Amish de la même communauté et 80% des mariés venus d’ailleurs sont eux-mêmes Amish. Les Amish ne font par ailleurs aucun prosélytisme.

Par la pratique de l’entre-soi. Les Amish se marient entre Amish, ils fréquentent peu les gens qui les entourent (les « Anglais »). Un dialecte allemand particulier, un mode vie singulier et l’autosuffisance alimentaire leur permettent de se couper du monde et de cultiver une conscience d’appartenance qui paraît plus ethnique que religieuse. La première règle amish est : « Tu ne te conformeras point à ce monde qui t’entoure ».

Par une longue expérience de la désobéissance civile. Les convictions religieuses des Amish leur interdisent de posséder des armes à des fins homicides (ils peuvent avoir des fusils pour la chasse. Le taux de criminalité chez les Amish est de 0%). Néanmoins, les Amish sont passés maîtres dans l’utilisation de la désobéissance civile (« La désobéissance civile est le refus assumé et public de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir jugé inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat pacifique » Cf. Wikipedia). Cette stratégie, adaptée à leurs convictions et à leur nombre, s’est montrée très efficace. A partir des années 1950, les Amish ont ainsi résisté avec succès à l’Etat fédéral qui voulait scolariser leurs enfants dans des écoles publiques. Ils ont été soumis à des amendes et certains Amish ont même été emprisonnés mais ils peuvent aujourd’hui organiser comme bon leur semble leur propre enseignement scolaire (arrêt de la cour suprême, 1972). Objecteurs de conscience, ils ont refusé, là aussi avec succès, de participer aux diverses guerres de l’Empire, et aujourd’hui ils résistent fort bien aux pressions de l’Etat fédéral qui voudraient leur faire adopter des méthodes de cultures moins   polluantes (sic !), et sans doute plus conformes aux intérêts de l’industrie agro-alimentaire.

Nous avions relevés dans un autre article que les communautés résilientes (Juive, Druze, Chaldéenne, Rom…) présentaient un certain nombre de caractéristiques communes qui les différenciaient  des communautés plus fragiles. Ces caractéristiques se retrouvent toutes chez les Amish :

  • Forte endogamie
  • Pratique de l’entre-soi et refus du "prosélytisme" 
  • Refus de l’assimilation
  • Conscience d’appartenance affirmée
  • Double règle de moralité (une règle valable à l’intérieur du groupe  – être solidaire des membres de la communauté – et une règle valable à l’extérieur du groupe – ignorer les étrangers)
  • Aptitude à se défendre (ici par la désobéissance civile)
  • Mise en place d’institutions parallèles à celle du groupe dominant (Conseil presbytéral, système scolaire…)

 

Les Amish confirment donc ce que nous avions observé ailleurs. Ils ont traversé sans ciller les deux guerres mondiales, la crise économique de 1929, la crise pétrolière, la crise financière de 2008, l’effondrement culturel des Etats-Unis à partir des années 70, l’effondrement sociétal à partir des années 1990. La population amish double tous les 23 ans ! Elle comptait 128 000 membres en 1992, elle en compte aujourd’hui 318 000 et il se crée une communauté amish supplémentaire toutes les trois semaines et demie ! Le moins que l’on puisse dire est que les amish sont des survivalistes expérimentés.

La résilience de la communauté amish doit inspirer notre renaissance nationale. Il ne s’agit pas de copier le mode de vie amish mais de s’approprier les règles particulières qui expliquent cette résilience, règles d’autant plus facilement repérables qu’elles sont, répétons-le, communes à toutes les communautés qui durent. Il s’agit moins d’imiter que d’adapter en fonction de notre propre culture et du contexte social et politique dans lequel nous évoluons. Par delà les variations de « superstructure » qui diversifient les communautés résilientes dont nous parlons (la religion, les coutumes, les pratiques culturelles…), il faut repérer les points communs qui renvoient à  «  l’infrastructure » (l’entre-soi, la sécession, la conscience d’appartenance, l’existence de structures de pouvoir…) et les intégrer à notre propre projet d’émancipation. Certains bâtiments résistent aux tremblements de terre, et d’autres non. Pour les distinguer, il est préférable de s’intéresser à la disposition des chaînages et des poutres, plutôt qu’à la couleur des tapisseries.

Les Autochtones européens et les populations blanches en général vivent une situation dramatique mais qui n’est en rien exceptionnelle dans l’histoire du monde. De nombreux peuples ont été confrontés à la même situation. Parmi ceux-ci, la plupart ont disparu. D’autres, par contre, ont survécu. Ignorons ceux qui ont disparu et appliquons les recettes de ceux qui ont survécu. Là est notre chemin, même s’il est difficile.

Antonin Campana

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A
http://cheshireclub.blogspot.fr/
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F
là , je suis d'accord avec votre article
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R
Les grands esprits se rencontrent comme on dit : justement, ce matin, avant de prendre connaissance de votre article, je pensais à cette communauté comme exemple de communautarisme vertueux. Les Amish nous montrent qu’il est toujours possible de constituer une communauté pour sauver et défendre son identité et ils l’ont fait sur la durée. <br /> <br /> J’ignorais leurs modes de fonctionnement ; merci donc pour ces informations. J’observe que le principe de départ est un acte de refus d’appartenir à une communauté plus grande dans laquelle on ne se reconnaît pas ou plus. Le point de départ est donc la sécession. <br /> <br /> Il importe donc de ne plus reconnaître la communauté imposée qui chez nous porte le nom de « communauté nationale »et « communauté européenne ». Cela suppose un grand renversement sémantique : je ne respecte plus la loi, je m’y soumets par force ; je ne paye plus d’impôts, je suis un exploité fiscal ; je n’écoute plus la Marseillaise, j’entends un hideux chant révolutionnaire etc.<br /> <br /> Cela doit aussi se traduire dans notre mode de vie, notre habillement, notre langue. Ainsi, il semble évident d’acheter des produits de notre terroir même s’ils plus chers. Nous devons parler une langue particulière. Pour nous, un Français châtié utilisant des mots de nos ancêtres devrait suffire à nous distinguer aujourd’hui. <br /> <br /> Il est également nécessaire de donner un nom à cette communauté puisque nous ne sommes plus à proprement parler des Français. On serait peut être davantage des Francs dans la Francie occidentale.
Répondre
I
@ribus. Des autochtones de France, des indigènes, des natifs, des Français de souche, des Bretons de souche, des Auvergnats de souche etc...
A
Nous sommes d'accord !

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