Si l’on admet que le peuple autochtone de France est un peuple emprisonné dans une société multiraciale artificielle, alors il faut admettre que le véritable combat politique ne peut être qu’une lutte absolue de libération nationale. Cette lutte doit prendre en compte trois facteurs déterminants : d’une part la toute puissance d’un Etat républicain qui représente exclusivement la société Frankenstein multiethnique et qui à ce titre nous est étranger, voire hostile ; d’autre part la présence d’une forte population allochtone objectivement liée à cet Etat (celui-ci garantissant l’installation définitive de celle-ci) ; enfin, la division et le manque de solidarité des Autochtones.
D’autres peuples ont connu des situations comparables et ont su mener avec succès une lutte de libération. Le peuple albanais du Kosovo est de ceux-là. Le combat pour l’indépendance de celui-ci peut donc être analysé avec profit. Il convient néanmoins de souligner préalablement que nous analysons ici des processus sans aborder leur légitimité. Nous n’oublions pas qu’il y a une différence de taille entre les Européens qui subissent sur leurs terres ancestrales une immigration de peuplement organisée, et les Albanais du Kosovo qui sont des immigrés venus s’installer sur des terres ancestrales serbes. Pour mémoire, le Kosovo était (est) le cœur spirituel et culturel de la Serbie (l’équivalent de notre Ile-de-France). Avant l’invasion ottomane, il était quasi exclusivement (98%) peuplé de Serbes chrétiens. Il est aujourd’hui (2013) peuplé à 92% d’Albanais musulmans (ceux-ci, profitant de nouvelles vagues migratoires, d’épurations ethniques et d’un taux de fécondité supérieur à celui des Serbes, composent 32% de la population du Kosovo en 1871, 47.88% en 1899, 60,06% en 1931, 73,7% en 1971 et donc 92% en 2013 !)
Ceci étant précisé, ne nous privons pas de tirer leçon de la manière dont les Albanais musulmans se sont émancipés de l’Etat serbe qu’ils abhorraient et de la société multiethnique qu’ils refusaient. Cela s’est fait en trois temps.
Première phase : le Rassemblement
Au début des années 1980, l’élite indépendantiste albanaise doit résoudre le problème de la fragmentation de la société albanaise. Si celle-ci présente une indéniable unité culturelle et religieuse, elle est socialement éclatée et divisée. Il n’y a aucune solidarité entre les familles et les clans dont les rapports sont régis par un droit coutumier (le Kanun) qui impose la vendetta et la « reprise de sang ». Chacun poursuivant ses propres intérêts familiaux, la société albanaise est, depuis des générations, une société en guerre contre elle-même, ne montrant ni solidarité nationale, ni unité face à l’Etat serbe.
Les dirigeants indépendantistes albanais ont très tôt compris qu’ils devaient unir leur peuple avant d’envisager son émancipation. L’idée a semble-t-il surgi dans les milieux étudiants progressistes sous la houlette de l’ethnologue Anton Ceta, bientôt nommé président d’un Conseil central du Mouvement national de Réconciliation. Voici ce que dit Anton Ceta de son action[1] :
« Les résultats au début furent assez limités, mais chaque semaine ils étaient plus encourageants et au bout d'un mois, aux premiers jours de mars, spontanément dans 23 communes, se sont formés des groupes pour la réconciliation du sang (…).
Des intellectuels avec la jeunesse s'informaient dans les villages et pendant le week-end, ils allaient prier les paysans, les gens isolés qui devaient faire la vendetta, de se réconcilier. En juillet, 600 cas avaient été réconciliés. C'était enthousiasmant... (…). Nous avons dit que le meilleur garant était le peuple, la jeunesse et le drapeau... Jusqu'à maintenant nous avons fait la réconciliation de mille cas de meurtres, de 500 cas de blessures et de 700 cas de conflits divers. Nous avons donné assez d’importance aux conflits divers car plus tard ils pouvaient finir par un meurtre (…).
Dans ces réconciliations publiques, il y a eu des réunions comprenant 100 ou 200 000 personnes, dans la vallée de Decani nous avons eu jusqu'à 500 000 personnes. Les gens venaient de tout le Kosovo et même de Macédoine, du Monténégro, de Serbie du sud, de Preshevo, tous voulaient voir comment se faisait la réconciliation, tous s'enthousiasmaient et certains pleuraient. C'était l'euphorie. Peut-être aurez-vous l’occasion de voir le film tourné sur place. Nous avons préparé à Decani la réconciliation sur les meurtres et les blessures, et des deux côtés venaient un représentant de chaque famille, ils se donnaient la main. Et celui dont le parent avait été tué ou blessé, déclarait à voix haute dans le micro : "Je pardonne le sang de mon père, de mon frère, de mon oncle etc. au peuple, à la jeunesse et au drapeau." Tout cela était accompagné d'un programme culturel, chansons, poésies, et dans cet enthousiasme, alors que nous avions prévu 40 cas, se sont présentés spontanément 16 autres cas : "Moi aussi je pardonne le sang de mon père". C'était un enthousiasme général qu’on ne peut pas s’imaginer... Et lors de ces réunions se rencontraient les vieux avec les jeunes, les professeurs ou médecins avec les analphabètes, les femmes avec les hommes, les filles avec les jeunes gens, c'était un rapprochement de tout notre peuple, et puis une solidarité, une consolidation, une union nationale. Le principal étant qu'il n'y avait plus de distinction selon la condition économique, la religion, ou la fonction. Et cela fut un grand résultat qui a entraîné ensuite des répercussions positives ».
Le journaliste et philosophe albanais Shkêlzen Maliqi écrira qu’à la suite de cette grande réconciliation « environ 2000 familles impliquées dans la vendetta se réconcilièrent, ce qui a libéré quelque 20 000 personnes assignées à résidence dans leurs maisons ».
Pour Ibrahim Rugova, futur président du Kosovo, cette « grande réconciliation » a été la libération intérieure, spirituelle et culturelle qui a conditionné l’indépendance. Elle a surtout permis d’entrer dans la seconde phase de l’émancipation : la sécession.
Seconde phase : la sécession
La société albanaise étant réunifiée, il était désormais possible de l’organiser. Les forces vives qui s’épuisaient dans une vendetta stérile allaient maintenant être dirigées contre l’Etat central. Mais pour cela, la société albanaise devait s’organiser en contre-société, ou plutôt en société parallèle ne vivant plus « avec » les autres nationalités ou « dans » la République de Serbie, mais résolument « à côté ».
Un parti dirigé par le philosophe et écrivain albanais Ibrahim Rugova fut créé en 1989 sous le nom de « Ligue Démocratique du Kosovo » ou LDK. Très vite, la LDK put s’appuyer sur un réseau de 25000 membres actifs et recueillir les sympathies d’une majorité d’Albanais. Rugova ne cache pas son rêve de réunir le Kosovo indépendant à l’Albanie (projet de « Grande Albanie »). Il opte cependant pour des méthodes gandhiennes non violentes plutôt que pour l’affrontement direct avec l’Etat central. Dès le 07 septembre 1990, une assemblée clandestine proclame la République du Kosovo. Rugova va pouvoir alors mettre en place un véritable Etat fantôme personnifiant la nation albanaise du Kosovo.
Ainsi, afin de court-circuiter les services sociaux et sanitaires officiels, les Albanais créent un système de santé parallèle avec des hôpitaux, des dispensaires, des antennes locales et des organisations humanitaires qui viennent en aide à des dizaines de milliers de familles.
Manifestant leur refus du programme scolaire unique valable sur tout le territoire de la République de Serbie, les dirigeants albanais décrètent le boycott des écoles publiques dépendant du gouvernement de Belgrade (février 1991). Ils mettent en place un système éducatif parallèle qui scolarisera, jusqu’à l’université, plusieurs centaines de milliers d’enfants dans des appartements privés, des entreprises désaffectées, des entrepôts…
Une administration parallèle s’installe logiquement. Celle-ci organise, en mai 1992, des élections parlementaires et présidentielles clandestines. Ibrahim Rugova est élu président de la République autoproclamée du Kosovo et nomme immédiatement un gouvernement parallèle.
Ce gouvernement entérine le boycott des impôts payés à l’Etat central ainsi que celui des charges dues aux institutions ou aux entreprises publiques relevant de Belgrade (impôts locaux, facture de chauffage, d’eau, d’électricité…). Il décrète cependant un nouvel impôt équivalent à 3% du salaire mensuel qui ira directement alimenter les caisses du gouvernement parallèle albanais.
Avec cet argent et celui de la diaspora, le premier ministre de Rugova, Bujar Bukoshi, achète du matériel militaire et crée, en 1998, une armée nationale encadrée par d’anciens officiers albanais de l’armée yougoslave : les Forces Armées de la République du Kosovo, ou FARK. Cette armée comptera entre 3000 et 5000 hommes de troupe, dont 200 à 300 officiers.
Ainsi, à la fin des années 1990, le Kosovo est de facto devenu un Etat indépendant qui a rompu l’essentiel de ses attaches avec l’Etat central serbe. Les Albanais possèdent « en parallèle », leur constitution, leur parlement, leur président, leur gouvernement, leur système de soin, leur système scolaire, leur administration, leur armée, leur drapeau (« drapeau de Dardanie » avec l’aigle albanais, voir photo). L’Etat parallèle perçoit l’impôt et finance ainsi ses propres institutions, dont une armée. Sans violence, la population albanaise du Kosovo a donc fait sécession.
Troisième phase : l’indépendance
Nul besoin d’être grand clerc pour pronostiquer qu’à ce stade l’Etat serbe, malgré toute son énergie, ne pouvait très longtemps garder une province (la « vieille Serbie » !) dont les Albanais, par l’immigration et l’accroissement naturel, s’étaient progressivement emparés. A moins d’y installer en masse de nouvelles populations serbes (lesquelles ? d’autant que les pressions albanaises, souvent violentes, avaient plutôt tendance à les faire partir), il ne fallait pas espérer inverser un processus qui ne pouvait mener qu’à une sortie des Albanais de la République de Serbie.
Cependant, effectivement, l’indépendance de fait n’était pas encore l’indépendance de droit… d’où l’entrée en scène de l’UCK.
L’UCK est connu pour être un groupe paramilitaire albanais favorable à l’épuration ethnique et à l’utilisation de la violence pour « libérer » le Kosovo de toute présence serbe. Cette organisation a ainsi commis de nombreux assassinats dont furent victimes principalement les Serbes, mais aussi les Albanais encore fidèles à l’Etat central (10% à 15% environ) ainsi que les membres des Forces armées de la République du Kosovo. Les Etats-Unis et leur vassaux se serviront de cette organisation à la fois criminelle et mafieuse, un temps classée par eux comme « terroriste », pour déclencher une guérilla armée qui justifiera l’intervention de l’OTAN contre la Serbie (et qui permettra l’implantation au Kosovo d’une énorme base américaine –camp Bonsteel- contrôlant tous les Balkans !).
Après la guerre contre la Serbie, le Kosovo échoit naturellement à l’UCK. L’indépendance ne tarde plus à être proclamée. Autrement dit, ce que la résistance passive d’Ibrahim Rugova était en passe d’obtenir par la désobéissance civile, l’UCK aidé de l’OTAN l’avait obtenu au prix d’une guerre qui fit des dizaines de milliers de morts (aucun du côté de l’OTAN, si l’on excepte les deux morts d’un accident d’hélicoptère) ! Car à n’en pas douter, le gouvernement parallèle de Rugova avait développé la bonne stratégie : l’inertie du gouvernement de Belgrade est là pour le démontrer. Ce dernier, à n’en pas douter, pourvu que la minorité serbe du Kosovo ne soit pas maltraitée, avait accepté une indépendance de fait contre laquelle il ne pouvait de toutes façons plus rien : il ne cherchait plus à recouvrer l’impôt et, faute de les reconnaître, il tolérait les institutions parallèles. Ce n’est que lorsque l’UCK assassinera des policiers et des civils serbes que Milosevic se résoudra à envoyer les première troupes dans la province (mars 1998).
Quels enseignements tirer de la « méthode albanaise » ?
Par « méthode albanaise » nous désignons bien évidemment l’action politique non violente menée par des personnalités comme Anton Ceta ou Ibrahim Rugova. L’UCK, quant à elle, n’aurait jamais pu mener à bien sa guérilla si Ceta n’avait pas unifié la société albanaise (grande réconciliation) et si Rugova ne l’avait pas organisée et dotée d’institutions parallèles. Sans cette mise en forme de la conscience nationale, l’UCK serait resté un groupuscule… malgré les armes et les instructeurs de l’OTAN !
Le premier enseignement qu’il convient de tirer est celui-ci : pour libérer un peuple d’un Etat étranger, il convient préalablement de le rassembler. Même si tout n’est pas superposable, les peuples autochtones européens, emprisonnés dans des sociétés multiculturelles, confrontés à des Etats qui nient leur existence, fragmentés par une ingénierie sociale criminelle, sont dans la situation des Albanais du Kosovo avant l’action du Conseil central du Mouvement national de Réconciliation. Sans cohésion, un groupe, quel que soit sa taille, n’est qu’une masse manipulable et sans importance. L’exemple albanais nous suggère d’initier, en fonction de notre propre sociologie, un Grand Rassemblement qui soit l’équivalent de la Grande Réconciliation albanaise. Il n’y a pas de recette miracle, mais il paraît évident que le premier travail sera d’unir les Réfractaires autochtones autour de la défense de la nation autochtone. Gageons que les évènements à venir vont les aider dans leur tâche. Tous ceux qui ne viendront pas spontanément à la nation autochtone la rejoindront par nécessité. Ces dernières années nous avons assisté à un exil géographique et horizontal d’Européens fuyant le vivre-ensemble. Les prochaines années connaîtront un exil spirituel et vertical d’Européens retrouvant leur lignée. Préparons-nous à les accueillir !
Rassembler le peuple « conscient » ne suffit pas : il faut aussi l’organiser. C’est le second enseignement de la « méthode albanaise ». La désobéissance civile est une arme redoutable : pourquoi être complice d’un Etat qui détruit notre peuple sous prétexte qu’il n’existe pas ? Rugova nous a montré qu’un peuple rassemblé, même très partiellement, peut parfaitement mettre en place ses propres institutions sociales, bancaires, scolaires, fiscales, militaires… Il peut se doter d’un parlement parallèle, d’un gouvernement parallèle, d’un Etat parallèle. Que resterait-il du pouvoir de l’Etat étranger républicain si les Autochtones européens de France refusaient de payer l’impôt en raison, par exemple, de la politique migratoire de celui-ci ? Il n’en resterait rien ! Impossible ? Les Albanais du Kosovo l’ont fait !
Car tout cela n’est qu’une question de nombre, de maillage et d’organisation ! De patience, et aussi de constance. Installer une société parallèle qui unifie un peuple au nom de son droit à l’existence, de son droit à disposer de lui-même, contre le racisme d’Etat qui l’avilit, contre un Grand Remplacement qui le détruit, pour sa dignité… est possible ! Faire d’un peuple une force politique organisée pour conquérir des droits collectifs puis l’indépendance est légitime lorsque l’Etat central est illégitime. Et quoi de plus illégitime qu’un Etat qui, au nom des ses prétendues « valeurs » universelles, met le peuple dans une telle situation d’insécurité que son avenir n’est plus assuré ?
Tout cela peut et doit se faire pacifiquement. L’Etat mondialiste républicain ne peut rien contre un peuple qui le boycotte et se rallie à un gouvernement parallèle autochtone reconnu par lui comme seul légitime. En 2017, un tel rassemblement autour d’un gouvernement autochtone paraît très illusoire. Pourtant, la conviction que « nos » élites politiques, médiatiques et économiques nous trahissent est de plus en plus répandue. D’autre part, les politiques d’immigration, la pression fiscale pour les financer, le vivre-ensemble forcé, le système d’avilissement destiné à museler la parole par le sentiment de culpabilité… ont développé une conscience d’appartenance autochtone qui se traduira tôt ou tard par des actes. Une partie du peuple autochtone européen est maintenant mûre pour le Grand Rassemblement. Il ne manque plus qu’une étincelle pour que cette prise de conscience se transforme progressivement en union nationale. Il revient aux Réfractaires européens d’être les Anton Ceta et les Ibrahim Rugova de la libération des peuples autochtones européens.
Antonin Campana
[1] Cité par Pierre Dufour, La non violence et la guerre au Kosovo, Autre Temps – Cahiers d’éthique sociale et politique, 2000, n°67