Les cadavres de l’attentat de Berlin sont encore chauds que déjà des voix de traîtres s’élèvent outre-Rhin pour demander, au nom de la cohésion de la nation allemande métissée par Merkel et consort, que l’identité du pays soit émancipée de la germanité. Et de s’interroger sur la nature de cette identité à construire. La même problématique agite en France les cerveaux débiles de la nomenklatura républicaine. Dans toutes les « sociétés ouvertes », la violence impose ainsi la question identitaire comme un sujet incontournable : est-ce le rôle des Autochtones de lui apporter une réponse ? Absolument pas, et voici pourquoi.
On sait que ce sont les peuples qui font les nations et que ce sont les identités qui font les peuples. Dissocier la nationalité de l’identité est donc une absurdité.
Une identité fait un peuple quand elle est un héritage commun. Un peuple fait nation quand il se pense de manière politique. Il y a une identité tsigane, un peuple tsigane mais pas de nation tsigane. Il y a une identité juive, un peuple juif mais aussi, par le sionisme, une nation juive. La nation sans racines identitaires ne renvoie ni à un peuple, ni à une identité mais à ce que la Bible appelle un « ramassis de gens » (« le ramassis de gens qui se trouvaient au milieu d’Israël fut saisi de convoitise» Nb 11.4).
La nation-ramassis n’est donc pas une nation à proprement parler. C’est une anomalie anthropologique accidentelle que l’Histoire se chargera rapidement de corriger, ou une construction voulue par des sots qui s’écroulera sous le poids de ses propres contradictions. La nation « française » est aujourd’hui, du fait des républicains, une nation-ramassis. Son destin nous intéresse dans la seule mesure où elle est une enveloppe artificielle qui enferme et étouffe la nation réelle et le peuple réel des Autochtones. Or la convoitise des gens installés au milieu de nous, excités par notre faiblesse, fait déjà se fractionner à coup de sociétés parallèles et d’attentats meurtriers cette gangue artificielle qui empêche notre peuple de disposer de lui-même. Il faut s’en féliciter comme un prisonnier se réjouit de voir ses chaînes se rompre.
Cependant la question de « l’identité nationale » de cette nation-ramassis, les débats relatifs à la cohésion de cette chose et à la possibilité illusoire d’imposer une identité commune et des valeurs sociétales qui permettent le « vivre-ensemble »… ne nous intéressent pas. Sans leur demander leur avis, on a imposé aux Autochtones une société ouverte et une nation artificielle composée de débris de peuples douloureusement greffés sur leur propre peuple. On a installé au milieu d’eux un « ramassis de gens » qui leur posent autant de problèmes qu’à l’Israël biblique. On a fait taire par la violence et l’intimidation les lanceurs d’alertes autochtones. En quoi la cohésion de cette nation-Frankenstein, promise à la mort quoi qu’on y fasse, cause de notre emprisonnement dans un melting-pot hostile, devrait-elle nous importer ? Au contraire, comme un oiseau qui veut sortir de sa coquille, notre peuple a tout intérêt à voir se disloquer ce monstre social. Que les problèmes du vivre-ensemble, de l’intégration, du terrorisme, de l’insécurité, des zones de non droit, soient résolus par ceux qui les ont créés : ce n’est pas notre affaire !
Les Autochtones constituent le seul peuple et la seule nation réels de ce pays. Le reste n’est qu’un corset d’acier qui l’emprisonne. La question identitaire qui nous devons nous poser en tant qu’Autochtones européens de France est celle de notre peuple, pas celle de la qualité de l’huile qui pourrait donner une souplesse aux jointures de notre camisole. Nous devons faire fructifier notre héritage commun pour rester un peuple conscient de lui-même, c’est-à-dire une nation. Peu importe que cette nation soit de fait prisonnière d’une nation-ramassis. Peu importe que le régime en place ne la reconnaisse pas. L’important est que les Autochtones aient conscience de leur appartenance à la nation réelle. C’est de cette conscience que peut naître l’action politique libératrice, non pour nous hisser à la tête de la nation-ramassis mais, dans un premier temps, pour obtenir des droits civiques : droit à l’existence, droit à la reconnaissance, droit à la dignité, droit à disposer de nous-mêmes, droit à une nationalité autochtone…
Ce combat pour les droits, un combat de type décolonial s’articulant sur les dispositions du droit international, n’est pas une fin en soi. Les avancées concrètes importeront moins que les capacités à fédérer et organiser notre peuple qui en découleront. Quand par le combat pour les droits, l’identité autochtone, le peuple autochtone, la nation autochtone, la nationalité autochtone apparaîtront à tous comme des évidences, alors la lutte de libération pourra commencer.
Résoudre le problème de la cohésion des sociétés ouvertes, dont les attentats ne sont qu’un épiphénomène, va donc à l’encontre de nos intérêts. La question identitaire doit être celle des peuples réels et non celle des constructions sociales artificielles. Que les républicains français et leurs homologues allemands se débrouillent avec les monstres qu’ils ont créés et qui tôt ou tard va les dévorer. Les identitaires autochtones doivent regarder tout cela d’un œil vigilant mais serein. Libérer le peuple du corset d’acier qui l’asphyxie doit être le seul objectif.
Antonin Campana