[Contrairement à d’autres régimes politiques dans d’autres pays, la République ne voit pas de différence entre la citoyenneté (appartenance administrative) et la nationalité (appartenance identitaire). Ce qu’elle appelle « déchéance de nationalité » n’est en fait qu’une déchéance de citoyenneté. Le réel va se charger de le lui rappeler].
Le débat sur la déchéance de nationalité révèle l’aberration du modèle républicain.
La république de 1789 a fait le choix absurde de réduire la citoyenneté à une appartenance administrative et de confondre dans le même temps cette citoyenneté hors sol avec la nationalité. De nombreux pays dans le monde (la Russie, la Serbie, Israël…) distinguent soigneusement la citoyenneté, c’est-à-dire l’appartenance administrative à un Etat, et la nationalité, c’est-à-dire l’appartenance identitaire à un peuple. Ainsi en Russie, on peut être citoyen russe de nationalité russe mais aussi citoyen russe de nationalité juive ou citoyen russe de nationalité ukrainienne, etc.
En France, jusqu’aux années 70, la distinction entre citoyenneté juridico-administrative et nationalité identitaire ne s’imposait pas puisque, sauf à la marge, tous les citoyens français appartenaient au même peuple identitaire. Les vagues d’immigrations et de naturalisations changent la donne puisqu’aujourd’hui la nationalité et la citoyenneté ne sont plus, et de loin, superposables.
Les conceptions républicaines nous font ainsi déboucher sur une situation absurde et mortifère pour notre peuple. Absurde, car en définissant la citoyenneté comme la capacité à jouir de droits civiques et en identifiant la citoyenneté à la nationalité, un Charles de Gaulle par exemple, privé par la force des choses de ses droits civiques, n’est plus un citoyen et n’est donc plus Français ! Mortifère, car la confusion des mots permet à la République de noyer notre peuple dans une masse de plus en plus nombreuses de « citoyens » d’importation.
La République a fait de la France un Etat multinational peuplé de citoyens « Français » répartis entre diverses nationalités : nationalité juive, nationalités maghrébines, nationalités africaines et bien sûr nationalité française, ou plutôt « autochtone » puisque le mot « français » a perdu sa signification identitaire. Le régime est pour l’instant dans le déni et refuse de reconnaître la réalité des appartenances identitaires… qui pourtant lui explose à la face, voyez les attentats.
Les nationalités, que la République le veuille ou pas, existent sur notre sol et n’ont rien à voir avec la citoyenneté. Ce sont les nationalités et non les citoyennetés qui structurent aujourd’hui l’espace social : les solidarités se font selon les appartenances identitaires et non selon les appartenances administratives !
L’appartenance identitaire transcende les appartenances administratives. Or la république ne dispose pas de l’appartenance identitaire. Autrement dit, la République n’a pas son mot à dire en matière de nationalité. Son théâtre sur la déchéance de nationalité joue de la confusion des mots. La République n’a pas les capacités de déchoir quelqu’un de sa nationalité. Elle peut seulement le radier administrativement de son "club" : lui enlever la « citoyenneté ».
La République est enfermée dans des conceptions du XVIIIe siècle et n’a pas vu le retour fracassant des nationalités. Demain, parce que les réalités l’emportent toujours sur le déni, elle devra les accepter formellement… à commencer par la nationalité autochtone. A ce moment, ce sont les Autochtones qui lui expliqueront qui est « Français » et qui peut être déchu de cette nationalité.
Antonin Campana