Pour le dictionnaire, une croyance est une « pleine conviction ». Il est difficile pour un homme libre d’imaginer l’absolue certitude que cela suppose mais il peut intellectuellement accepter celle-ci… pour peu que les faits ne la rendent pas ridicule. On peut par exemple admettre une « pleine conviction » en matière religieuse car rien ne contredit l’existence de Dieu (bien que rien ne la prouve non plus). La croyance béate en un projet politique, plus étonnante encore tant les idéologies absolues sont éphémères, relève d’autant plus de l’absurde que ce projet a été durement sanctionné par un réel implacable. Ainsi par exemple, croire en la possibilité d’un paradis communiste sur terre est aujourd’hui de l’ordre de l’aveuglement pathologique tant est grand le déni de réalité que cela suppose.
La République est l’objet d’une croyance qui entre parfaitement dans cette dernière catégorie. De nombreux dévots se prosternent devant ses « valeurs » et se signent devant le supposé pouvoir bénéfique qu’elle aurait sur la société des hommes. Pourtant, le réel a depuis longtemps montré l’absurdité de cette « pleine conviction ». L’entêtement à croire que le miracle républicain se réalisera avec « plus de République », à la fin des temps sans doute, révèle une foi inébranlable qui confine à la superstition. Autant toucher du bois.
Quel est le credo de cette foi républicaine ? Il peut se décliner comme ceci :
«Je crois en la double nature de l’homme. En sa nature essentielle, commune à tous les hommes (l’Homme), et en sa nature accidentelle, propre à chaque homme (l’identité ancestrale, religieuse, culturelle…).
Je crois en la dissociation des deux natures : la nature essentielle des hommes doit s’exprimer en société, par le biais de la citoyenneté, et la nature accidentelle des hommes doit être confinée aux domaines privés.
Je crois qu’une société harmonieuse peut fonctionner avec des hommes venus de toute la terre pourvu que ces hommes aient été préalablement « dissociés » (grâce aux « mécanismes de l’intégration »). Je crois que tous les hommes peuvent être dissociés.
Je crois qu’une société neutre avec des hommes neutres et la meilleure qui soit et je crois que la République a pour mission de la fonder. Amen».
Cette profession de foi républicaine (qui synthétise les vraies « valeurs » de la République), relève évidemment de l’absurde dans la mesure où la réalité a déjà montré cent fois que l’homme était une unité indissociable, que son identité était essentielle car structurante, que par conséquent tout processus de « dissociation » de la nature humaine générait une résistance, donc « l’échec des politiques d’intégration », voire un processus de guerre civile (terrorisme…).
Comme tous les dévots, les républicains sont incapables de tenir compte du verdict des faits. Ils mettent en place des mécanismes inquisitoriaux destinés à les briser. Enfant, j’avais demandé à mon père à quoi se reconnaissait une dictature. Il m’avait répondu : « aux militaires armés qui patrouillent dans les rues ». La République a engendré un modèle de société si instable, si éloigné des réalités humaines, que, pour la faire tenir, elle doit faire patrouiller des militaires armés dans nos rues. C’est ainsi qu’une croyance absurde se transforme en dictature stupide.
Antonin Campana