Le 19 janvier dernier, François Hollande participait au dîner du « Conseil de coordination des organisations arméniennes de France ». Il y délivrait des paroles de miel (« cette année […] verra de nouveaux gestes, de nouvelles étapes vers le chemin de la reconnaissance ». Etc.)…
En mars 2014, Hollande participait au traditionnel dîner du « Conseil représentatif des institutions juives de France » (CRIF). Il y délivrait des paroles de miel (« La liberté de moquer n’est pas la liberté de haïr ». Etc.)…
Les dîners du « Conseil représentatif des associations noires de France » (CRAN) ont vu se précipiter ministres et chefs de partis : Marie-Georges Buffet, Roselyne Bachelot, Bernard Kouchner… Ils y ont tous délivré des paroles de miel (Bachelot : « Je suis une fervente apôtre de la discrimination positive… ». Etc.)…
Le dîner de rupture du jeûne (iftar) du « Conseil Français du Culte Musulman » et de « l’Union des Organisations Islamiques de France » (UOIF), a eu le plaisir d’accueillir le premier ministre Valls. Celui-ci y a délivré des paroles de miel (« la montée des violences à l’égard des musulmans de France… ».Etc.)….
Le récent « Conseil représentatif des associations asiatiques de France » (CRAAF) ne fait pas encore de dîner. Néanmoins, il attire la bienveillance des politiciens qui déjà lui délivrent des paroles de miel (Anne Hidalgo : « Le dynamisme économique des communautés asiatiques est un atout majeur pour Paris ». Etc.)…
Gageons que le « Conseil représentatif des sikhs de France », le « Comité de coordination des musulmans Turcs de France » (CCMTF) ou la « Maison du Tamil Eelam – France » (regroupant des Tamouls) attirent tout autant la sympathie « spontanée » de nos politiciens désintéressés.
Bon, mais ne manque-t-il rien à cette liste de « Conseils représentatifs » ?
Le problème, car s’en est un, est que la plupart de nos concitoyens ne voient pas l’absence de taille, pourtant évidente : celle d’une représentation autochtone. C’est qu’ils ont naïvement été persuadés que les Français de souche sont représentés par la République, par Hollande ou qui sais-je ?, et qu’il n’y a nul besoin, pour eux, d’une instance spécifique.
Ils ignorent qu’en République le « peuple » n’est qu’un corps électoral composés de citoyens isolés et seulement caractérisés par leur statut juridique. Autrement dit la République ne reconnaît (officiellement) ni les Tamouls, ni les Turcs, ni les Juifs, ni les Autochtones. Elle ne connaît que des citoyens (qu’elle baptise abusivement « Français ») et des non citoyens.
Alors pourquoi politiciens, ministres et Présidents vont-ils caresser dans le sens du poil les « Conseils représentatifs » des communautés exogènes ? Par pur « realpolitik », parce que ces communautés constituent désormais au niveau local ou national des « puissances » avec lesquelles il leur faut compter. Dans le discours (celui qui s’adresse aux Autochtones), les politiciens pratiquent cyniquement le déni (la République est « Une et indivisible » !). Dans les faits, les choses sont plus compliquées voyez-vous… Difficile de ne pas tenir compte du pouvoir de nuisance des communautés exogènes organisées, difficile de se suicider électoralement, difficile de ne pas paraître « sympathique »… Cela se traduit par des « paroles de miel », mais aussi des promesses et in fine des lois (mémorielles par exemple).
Les seuls à ne pas avoir compris comment « marchait » la République sont les Autochtones, véritables « cocus » de l’histoire récente. La République a accouché de la violence et ne respecte « génétiquement » que les rapports de force. Soit les Autochtones s’organisent comme les autres, et ils deviendront « visibles » pour la République, soit ils refusent de se penser en tant que groupe, en tant que peuple enchâssé dans une communauté civique melting-pot, et ils ne récolteront qu’un mépris mérité.
Le temps est donc venu pour qu’apparaisse un « Conseil représentatif des associations autochtones ». Il assurera la représentativité politique du peuple autochtone auprès de la République, il sera le porte-parole du peuple autochtone, il sera une instance de revendication de droits collectifs, il luttera contre le racisme et les discriminations dont les Autochtones sont victimes… La création de ce Conseil ne découle pas d’un choix ou d’une stratégie politique mais d’une obligation. La République ne reconnaît aucun « corps intermédiaire » entre elle-même et l’individu. Soit nous laissons les Autochtones être seuls face à un régime politique qui nie leur appartenance, soit nous les unissons, comme font les populations exogènes, pour défendre leurs droits collectifs. Soit nous restons des individus, soit nous nous comportons comme un peuple.
Donnons-nous les moyens de conquérir nos droits. Maintenant !
Antonin Campana